Les Mercredi poétiques de Louis

…

Elle dit à Maman : « Il faut que je le prenne. » 
Alors, j'ai réagi comme les hommes forts 
Que l'on prend le matin pour leur trouer le corps. 
En m'éloignant j'ai dit : « Ne pleure pas ma mère, 
Bientôt nous serons tous réunis avec Père. » 
La gardienne me prit, manu militari, 
Vers l'îlot d'à côté, j'étais anéanti. 
Les enfants chahuteurs, sortaient du réfectoire. 
Pour être bien précis, je fouille en ma mémoire, 
Cherchant les souvenirs tenaces et têtus... 
Oui ! Les enfants étaient sales et mal vêtus. 
La vue d'un tout nouveau les étonna peut-être, 
Car ils vinrent curieux, afin de me connaître. 
L'un  d'eux m'avait souri, c'était le plus menu 
Comme lorsqu'on salue un ami bien connu. 
Nous fûmes encadrés par une jeune escorte, 
Avec curiosité jusqu'au pied de la porte. 
La gardienne leur dit la phrase que voici : 
" Allez déguerpissez ! Sauf ceux qui sont ici ! "
Un grandet brun de teint, et celui au sourire 
Entrèrent avec nous, curieux, sans rien dire. 
Les autres dépités s'en allèrent plus loin. 
De mon grand désarroi, Dieu seul était témoin. 
Les lits bien alignés remplissaient les deux faces. 
Nous allâmes au fond vers les dernières places. 
La gardienne me dit en m'indiquant le lit : 
"Tu le partageras, tiens, avec ce petit !"
 Etait-ce du hasard ou l'un de ses caprices 
Qui émaillent la vie en nous rendant complices, 
Ou bien tout simplement que le petit savait 
Que dès l'après-midi, un nouveau arrivait ? 

 ...