Les boues - Acte 2

En trouvant de potentiels terrains pour épandre les boues issues de sa station de traitement et en misant sur un traitement à la chaux pour réduire les teneurs en cuivre, la commune pensait avoir trouvé une issue à un problème qui dure depuis deux ans. La DDTM n'a pas du tout été convaincue.

Une copie à revoir. Voilà résumé l'avis de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), qui a débouché sur un arrêté préfectoral portant opposition au plan d'épandage des boues issues de la station de traitement des eaux usées de Saissac. Un épisode de plus pour ce problème que traîne la commune depuis 2017, avec le constat de taux en cuivre des boues allant bien au-delà des teneurs acceptées en vue d'un épandage sur des terres agricoles. Avec une valeur limite fixée à 1 000 mg/kg de matière sèche, les taux relevés lors des analyses menées en 2017 (en juillet), en 2018 (en novembre), et enfin cette année, le 15 mars, sont loin du compte : 2 480 mg/kg, 1 787 mg/kg et enfin 1 950 mg/kg ont ainsi été relevés. Le coupable est connu : l'agressivité de l'eau aurait pour effet de dissoudre le cuivre des canalisations des habitations ; pas de conséquences sur les normes liées à la potabilité, mais, à l'heure d'arriver dans le silo, la concentration en cuivre explose.

Des boues destinées à des parcelles où blé, tournesol, maïs, colza sont cultivés

Avec un plan d'épandage qui prévoit de disperser ces boues sur des parcelles concernées par des cultures de blé dur, d'orge, de méteil, de tournesol, de sorgho, de maïs, du colza ou des prairies, la DDTM pouvait donc difficilement donner son blanc-seing. D'autant plus, précise l'arrêté, que "le plan d'épandage doit démontrer l'innocuité des boues que ce soit envers les exploitants, les parcelles et les productions agricoles, les milieux aquatiques et notamment le bassin du Lampy". Une condition sine qua non loin d'être atteinte, considère la DDTM. La commune de Saissac a bien tenté de s'engager dans la voie d'une addition de chaux pour faire baisser les teneurs en cuivre. Mais pour l'administration, si la municipalité a bien fourni un devis sur le coût d'une telle manipulation, elle n'a pas fourni d'étude assurant de la réussite de la manœuvre.

Une expérimentation avec la chaux pas concluante

Une expérimentation a bien eu lieu, avec l'appui du syndicat d'assistance technique pour l'épuration et le suivi des eaux (SATESE) de l'Aude : 20 litres de chaux ajoutés à 50 litres de boues, et à l'arrivée, une concentration passée de 1 846 mg/kg à 894 mg/kg. Mais trois semaines plus tard, le taux de cuivre remontait à 963 mg/kg. Pas de quoi "démontrer la stabilité du mélange", juge donc la DDTM. Qui enfonce le clou en précisant que la convention passée avec les exploitants agricoles "n'indique pas que les boues à épandre présentent une concentration en cuivre supérieure à la valeur limite réglementaire". Autant de considérations qui font du plan d'épandage un document qui "porte atteinte à l'article L.211 du Code de l'Environnement". Un document donc rejeté, pour prolonger le triste statut octroyé sur le site du ministère de la Transition écologique et solidaire à la station de Saissac depuis 2016 : "Conforme en équipement, non conforme en performance."

• Le courrier du maire à la préfète 
  C’est avec dépit qu’Eric Béteille, le maire de Saissac a pris connaissance du rejet du plan par la DDTM. Dépit, car l’élu estime que le « chaulage des boues est concluant pour faire baisser le taux de cuivre. Mais la DDTM nous dit qu’on doit absolument passer par un bureau d’études pour le valider. On est prêts à le payer, on fait des pieds et des mains pour en trouver un, mais on n’y arrive pas. » Un blocage que le maire a donc signalé dans un courrier adressé ces derniers jours à la préfète Sophie Elizéon : « Parce que c’est aussi à l’administration de nous amener une solution. »

https://www.lindependant.fr/2019/10/25/saissac-des-teneurs-en-cuivre-qui-plombent-le-plan-depandage-de-la-commune,8504555.php